En juillet 2021, Niro livrait l’édition finale de son album Sale môme, qui se concluait sur le titre À jamais, dans lequel il évoque la fatigue accumulée par la productivité incroyable à laquelle il a habitué le public depuis plus d’une dizaine d’année. Cette outro annonçait ainsi le retrait temporaire de l’artiste du devant de la scène, le temps de recharger ses batteries auprès des siens. Pendant plus d’un an, il s’est fait extrêmement rare, n’apparaissant qu’épisodiquement, invité par Jul sur le posse-cut Loi de la calle ou sur le titre Question de Skaodi, ce qui a sans surprise fait progressivement grandir l’attente de son retour chez ses fans. Ce retour a donc pris la forme d’une tournée, dont le moment phare était le concert au Zénith de Paris ce vendredi 28 octobre, l’occasion également de revenir sur plus d’une décennie d’une carrière extrêmement riche.
Le show, dirigé d’une main de maître par DJ Roc-J, débute par la prestation de l’artiste invité en première partie, à savoir Fresh La Douille. Le rappeur d’Ivry-sur-Seine déborde d’énergie et rappelle fortement le Niro des débuts, et enchaîne des titres issus de ses deux premiers projets, 02 Géné et Toujours +. Niro est ainsi placé dans les meilleures conditions pour débuter sa prestation, accompagné par son acolyte de toujours Koro, qui, en plus de son rôle de backeur, n’hésite pas à prendre le micro pour haranguer le public. Tout de noir vêtu, Niro se présente dos à la foule, avant d’entamer les premières notes de Phénomène, l’un des titres marquants de l’album Miraculé, suivi de On est prêt, issu de Mens Rea puis d’Uber X que l’on retrouve sur Stupéfiant. Commencer ainsi le concert avec des titres respectivement sortis en 2014, 2018 et 2019, donne le ton du concert, durant lequel l’ambiance sera souvent à la nostalgie et à la redécouverte de titres marquants de la part du rappeur de Blois. Inspiré par cette énergie, Koro prend le micro pour s’adresser directement à Niro et lui rappeler que dix ans avant, il réalisait alors sa première date parisienne pour laquelle il a rempli les trois cent places de La Boule Noire, ce qui permet de mesurer l’évolution de Niro, qui remplit désormais le Zénith.
Niro n’a jamais caché son fort attachement à Blois, sa ville d’origine, et partager un tel moment avec les habitants de son quartier lui tenait forcément à cœur. Il fait ainsi monter sur scène deux jeunes chanteuses de son quartier, lesquelles, soutenues par des choristes, lui permettent de donner une nouvelle énergie au déjà très émotionnel Mama t’avais raison, avant un brutal changement d’ambiance dès les premières notes du titre suivant, #Bawémonami, l’un de ses bangers les plus explosifs. Le public à nouveau survolté par l’énergie de Niro peut ensuite repartir sur un rythme plus tranquille avec un enchaînement Mwana Mboka–Bénef, sur des sonorités plutôt afro-caribéennes. L’artiste s’adresse ensuite une nouvelle fois au public et se souvient avec émotion de la première fois qu’il était dans cette même salle, montrant du doigt une partie des tribunes. Il était alors venu voir Kery James, tandis qu’il était en pleine préparation de son tout premier opus Paraplégique. La transition est alors parfaite pour enchaîner avec des morceaux extraits de cet album, Vie de gangsta puis Où sont tes potes, pour lequel a lieu une petite mise en scène. Niro rappe assis sur un banc, tête baissée et cachée sous sa capuche, tandis que les membres de son équipe représentent les amis qui s’en viennent et vont au cours de la vie, ils s’asseyent et se relèvent tout au long du morceau. Le dernier à s’asseoir sur ce banc est Ben PLG, qui ajoute un couplet inédit au morceau, ce qui est hautement symbolique pour quelqu’un qui rappait : « Pour l’jour où on m’enterre, ça s’ra Salif et Niro en BO » dans Cœur propre et mains sales.
Niro enchaîne ensuite avec une nouvelle invitée, pour interpréter un autre de ses plus gros hits. Lyna Mayhem l’accompagne ainsi sur Naïf, elle qui fait les backs du titre original sans toutefois être créditée. Ici, elle backe à nouveau Niro comme sur le morceau tel que l’on peut le retrouver dans l’album Si je me souviens, avant de reprendre le dernier couplet seule avec l’appui des choristes, ce qui exacerbe encore plus l’aspect émotionnel de ce titre. De nouveau seul, Niro interprète ensuite d’autres titres marquants de sa discographie, l’énergique Hors catégorie puis l’introspectif Blasé, avant d’enchaîner avec ce qui est peut-être son hit le plus “ouvert“, Sors de ma tête, qui provoque une énorme réaction de la partie féminine de la foule. Cette nouvelle énergie insufflée au concert permet d’enchaîner avec le très estival Vamos, puis de plonger le Zénith dans une ambiance club avec After, pour lequel il regrette la non-présence d’Alonzo, malgré tout ovationné par le public. Après un show d’une telle intensité, quelques minutes de récupération étaient plus que méritées pour Niro, qui passe alors le relais à Koro, son acolyte de toujours.
Koro, qui apparaît sur l’immense majorité des projets de Niro, a malheureusement une discographie solo trop peu fournie au regard de son talent, c’est donc avec des reprises de classiques qu’il décide de tenir en haleine le public. S’enchaînent alors Pour ceux de la Mafia K’1 Fry, A.W.A. de Lacrim et French Montana et Finis-les d’Alonzo, avant que Niro ne revienne tout de blanc vêtu pour interpréter Pas d’blaah. Il chauffe à nouveau la foule avant d’enchaîner avec S3, débordant d’énergie. Le côté performeur de Niro s’exprime également dans ses featurings, dans lesquels il se surpasse pour proposer le meilleur couplet à ses vis-à-vis. Si Ninho et Gims ne font malheureusement pas partie du spectacle ce soir, Niro enchaîne ses couplets de Kim-Jong-Il et Ceci n’est pas du rap malgré quelques soucis logistiques qui l’obligent à recommencer la deuxième partie. Une autre collaboration lui tenait à cœur, le bien plus doux Amiga avec Soolking, lui aussi absent mais dont le refrain, même en play-back, a conquis le public. Niro reste malgré tout un kickeur avant tout, et a ensuite remis le couvert avec Fort et vivant, avant de convier Zed et Stavo du groupe 13 Block pour leur trio Si tu me vois, une dernière dose d’adrénaline avant une nouvelle interruption du concert.
Koro annonce une grosse surprise à Niro, qui semble déjà l’imaginer sans trop y croire. Un disque de platine lui est apporté directement sur scène pour récompenser l’album Sale môme, dont la certification a été officialisée le matin même du concert. Légèrement pris au dépourvu, Niro a tenu à remercier ses proches, en particulier sa famille et ses enfants, l’occasion de reprendre le fil du concert avec En double appel. Pour que la fête de la certification de Sale môme soit parfaite, Niro invite deux spectateurs sur scène pour interpréter avec lui l’un des titres forts de cet album, Millenials (Génération Y). Lenny, l’un des deux élus, est submergé par la pression et oublie rapidement les paroles, tandis que Donia, l’autre invitée, épaule Niro à la perfection, pouvant presque passer pour une rappeuse professionnelle. Ovationnée par le public du Zénith, elle retrouve ensuite sa place pour laisser Niro interpréter seul l’émouvant Pardonnable, et, puisqu’il se plaît à étaler son immense éventail artistique, interprète sa partie de son duo iconique avec Kaaris, La mort ou Tchitchi. Le concert touche à sa fin, mais un titre en particulier a été réclamé toute la soirée par la foule, et Niro finit par l’interpréter, il s’agit évidemment de son banger classique VivaStreet. Bracash, ce rappeur fictif incarnant tous les clichés du rap, créé par Niro en marge de la promotion de l’album Sale môme, fait ensuite son apparition sur scène pour amuser la foule et l’arroser à coups de pistolet à eau. Une fois Bracash sorti de scène après son interlude déjanté, Niro s’avance pour interpréter le dernier morceau de la soirée, À jamais, celui-là même qui avait entériné sa période de pause. Après les dernières notes, Niro annonce la fin de cette pause, et par la même occasion la sortie de son douzième projet, sobrement mais justement intitulé Taulier, qui sortira courant décembre. Ce concert fut l’occasion de regarder dans le rétroviseur et d’admirer tout le chemin parcouru, mais également de prouver à son public que la suite sera tout aussi, si ce n’est plus, belle et riche. À trente-cinq ans, Niro n’est pas près de tourner la page et compte continuer à régaler les oreilles des auditeurs pour encore bien longtemps.
Article rédigé par Adrien
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