Après un long chemin tracé dans les coulisses de l’industrie musicale, Mr Kayz revient sur le devant de la scène avec le projet Bor2rline. À cette occasion, il s’est confié à Scred Magazine sur son parcours, sa vision artistique, ses ambitions et ses activités annexes.
ADRIEN : Bonjour Mr Kayz, tu as sorti ce 28 avril ton projet Bor2rline. Pourquoi porte-t-il ce nom ?
MR KAYZ : C’est le deuxième volume, après Bord3rl1ne, et Borderline est également le nom de mon label. C’est le nom du mindset qu’on a. Ça veut dire quelque chose pour moi, c’est la traduction littérale de “frontières“ en anglais. Si t’es en France, on va attendre de toi que tu te comportes comme un français, si t’es en Belgique, on va attendre que tu te comportes comme un belge… Mais si t’es à la frontière, le seul truc qui reste c’est toi. Être moi-même, c’est quelque chose de super important pour moi, c’est pour ça que le label s’appelle Borderline.
A : Quel a été ton parcours musical jusqu’ici ?
MK : J’ai sorti Bord3rl1ne quand j’étais chez Sony, puis Onze de légende en indépendant, j’ai aussi fait du ghostwriting avant. Et encore avant ça, j’avais sorti des tracks avec des potes, mais c’était pas nécessairement professionnel.
A : Quels sont les premiers artistes à t’avoir inspiré ?
MK : J’ai surtout été inspiré par un de mes grands frères, l’entourage proche et les mecs du quartier, mais le premier artiste que j’ai vraiment aimé c’est DMX, grâce à son côté écorché vif. Ensuite, je commence à comprendre le rap avec Jay-Z, vu que j’ai une partie de ma famille qui est américaine, j’ai eu un rapport très direct avec le rap US. En France, ça a été Time B.O.M.B. et X-Men en premier. Quand j’étais petit, je croisais souvent Lunatic également. Donc oui, tout Time B.O.M.B., c’est des influences directes sur moi, c’est des héros.
A : Que s’est-il passé pour toi durant les quatre ans et demi qui séparent Bord3rl1ne et Bor2rline ?
MK : Le 1 sort un tout petit peu avant le Covid, on est déjà sur le 2. Un peu avant le confinement, mon chef de projet se taille, il faut que les choses se refassent. Puis le Covid arrive, mon projet est repoussé, mon label ferme, et j’arrive à me sortir du projet. J’ai une toute nouvelle équipe, une toute nouvelle vision, j’ai envie de partir sur quelque chose de neuf et frais, et je me sens suffisamment neuf et frais pour être mon propre producteur.
A : Tu as beaucoup travaillé dans l’ombre, notamment dans le ghostwriting. Est-ce que ce ces activités annexes ont eu un impact sur la création de ce deuxième projet ?
MK : Oui, parce que j’ai une écriture très cinématographique. Ça m’a permis de prendre des angles différents sur certains morceaux. Ça m’a aidé à faire ressortir plus de facettes de moi sur le deuxième volume que je ne le faisais sur le premier.
A : Peux-tu étendre le concept du titre avec des lettres remplacées par des chiffres sur plusieurs volumes, ou faut-il au contraire changer de concept à un moment donné ?
MK : Dans tous les cas, j’ai imaginé le concept des EP en trilogie. Je ne sais pas encore si le troisième va s’appeler Borderline, mais il existera pour boucler cette boucle. Faut trouver où caser le 3, peut-être qu’il s’appellera juste Borderline 3 (rires).
A : Dans le projet, il y a deux morceaux nommés La faute d’Abdoul (Part 1. / Part 2). Qui est ce Abdoul et quel impact a-t-il eu sur ta vie ?
MK : Abdoul, c’est un poto à moi, mon ancien manager. C’est la personne qui était avec moi au moment où je suis chez Sony. Ces morceaux ont été écrits après des discussions avec lui. La première partie c’est de l’egotrip, je sur-rappe, alors que la partie 2 c’est la partie plus apaisée et réfléchie de moi-même, avec plus de distance.
A : Pourquoi avoir choisi de couper ce titre en deux parties ?
MK : Dans la première partie, il y a déjà un changement de prod, et je ne voulais pas faire un morceau de cinq minutes. Je voulais pouvoir garder l’attention, donc couper au milieu était la meilleure solution.`
A : Comment s’est faite la connexion avec Swift Guad et Eech, présents sur le titre Paname est triste ?
MK : Eech, c’est un mec que je connais via Grödash, on s’est rencontrés en studio. Lui-même est pote avec Swift Guad, et Swift Guad est pote avec mon manager. La connexion s’est donc faite en studio, à des moments différents pour chacun.
A : En parlant de Paname, tu as ouvert une boutique nommée Yalla, rue Marcadet, à quelques pas de la Scred Boutique. Est-ce que cette activité te permet de couper avec le monde du rap, ou au contraire de t’en rapprocher encore plus ?
MK : Les deux. La Scred m’a accueilli les bras ouverts. Mokless c’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup, c’est cool de pouvoir discuter d’homme à homme avec lui, de sujets profonds. Il m’a montré une partie du rap, je ne dirais pas underground, mais plutôt “manufacturé“, qui me fait beaucoup plaisir. Mais j’ai mon propre univers, et ça se ressent dans ma boutique à moi. C’est de la seconde main, et dans le business comme dans la musique, j’essaie de créer le monde dans lequel j’ai envie d’évoluer.
A : Tu es originaire des Yvelines. Une compilation réunissant la plupart des artistes du département se prépare actuellement, as-tu été approché pour y participer ?
MK : C’est fait par des mecs que je connais, mais c’était pas le bon moment pour moi, parce que j’étais sur mon projet. J’étais dans le flou, j’avais pas de deadline, c’était compliqué de m’y engager…
A : S’il y a un volume 2, tu pourrais être dedans.
MK : C’est possible, mais je vais pas te mentir, ça fait très longtemps que je n’habite plus dans les Yvelines. Je ne fais pas nécessairement un rap territorial. Après, t’as plein de rappeurs qui marchent bien dans les Yvelines, t’as Hatik et Bosh, qui font très bien leur job, et les Yvelines c’est grand, y’a de quoi faire avec eux.
A : Tu as un homonyme DJ, qui a beaucoup de succès, DJ Kayz. Comment vis-tu cette situation, et as-tu peur d’être confondu avec lui ?
MK : Absolument pas, Mr Kayz c’est Mr Kayz et DJ Kayz c’est DJ Kayz. On ne fait pas le même style musical. Aux States tu vas avoir plein de Lil Machin avec des noms similaires, et ça ne dérange personne, il y a de la place pour tout le monde.
A : Comptes-tu ensuite enchaîner sur un nouveau projet rapidement, ou plutôt laisser passer le temps comme tu l’as fait entre le premier et le deuxième opus ?
MK : Pour ne rien te cacher, je suis déjà dans les tuyaux, je suis en train de me concerter avec mon équipe sur la suite, que ce soit à l’interprétation ou à la production. Je suis déjà en train de planifier la suite, les nouveaux concepts, les nouveaux projets.
A : Est-ce que ce projet peut t’ouvrir les portes de nouvelles connexions et collaborations ?
MK : Totalement. Ce projet-là sert beaucoup à ramener la couleur musicale qui m’est propre, mais la musique c’est aussi un truc vivant. De la même manière dont j’apprends de Mokless quand il me parle de rap français, j’apprends d’autres manières de voir les choses. Tout ce qui a du sens, c’est quelque chose que je veux faire. J’aime la musique, et à chaque fois que je peux me connecter avec des gens qui vont dans le même sens que moi, je le fais.
A : Aura-t-on l’occasion de te voir défendre ce projet sur scène ?
MK : Oui, j’ai commencé avec la release party qui s’est superbement bien passée le 27 avril. Y’a d’autres concerts prévus, je n’ai pas encore les dates, mais ça arrive bientôt. Je suis en formation avec mon groupe Unexpected, et y’a un mélange de musique live, guitaristes et saxophones, avec un DJ. Même dans la manière de défendre le projet, on arrive avec notre couleur.
Le projet Bor2rline de Mr Kayz est disponible sur toutes les plateformes de streaming ainsi qu’en physique à la Scred Boutique.
Interview réalisée par Adrien