Après un parcours dans l’underground au sein du groupe Eddie Hyde, HoussBad a été mis en avant par sa participation remarquée à la première saison de l’émission Nouvelle École, organisée par Netflix. Outre ses talents artistiques, sa bonne humeur et sa personnalité ont permis de faire de lui un des chouchous du public, qui a ensuite attendu presque un an un projet de sa part. L’EP Gate 67 est finalement sorti le 19 mai dernier, et présente un peu plus la palette artistique d’HoussBad, qui est revenu sur son parcours et son identité artistique pour Scred Magazine.
ADRIEN : Bonjour HoussBad, tu viens de sortir ce 19 mai Gate 67, ton premier projet depuis ton passage remarqué dans la saison 1 de Nouvelle École l’an dernier. Que signifie le titre ?
HOUSSBAD : Gate 67, c’est inspiré du film Le Terminal, avec Tom Hanks et réalisé par Steven Spielberg. C’est l’endroit où le protagoniste se repose, qu’il peut façonner à son image. C’est un peu ce que j’ai essayé de faire avec ce projet, c’est un peu ma carte de visite officielle après l’émission, et ce que je voulais présenter au public c’est 100% moi.
A : Est-ce que le cinéma est un domaine qui t’intéresse ?
H : J’aime beaucoup, oui. Je ne me dirais pas cinéphile mais j’aime beaucoup le cinéma, j’y vais très souvent.
A : Cet EP arrive presque un an après ton passage dans l’émission. Contrairement à Fresh ou B.B. Jacques qui ont rapidement capitalisé sur l’exposition que leur a apporté Nouvelle École, tu es resté davantage en retrait, était-ce ton plan initial au moment de la diffusion ?
H : J’avais pas vraiment de plan particulier, je me disais juste que j’avais besoin de prendre du temps pour moi après l’émission, et vraiment savoir quel type de musique je devais donner au public.
A : Avant cette émission, tu étais déjà bien actif dans le rap, avec le groupe Eddie Hyde aux côtés de 3010 et Take A Mic notamment, et tu avais déjà sorti un projet solo en 2019. Comment as-tu fait les rencontres qui ont mené à ce début de carrière ?
H : C’est 3010 qui m’a contacté à l’époque, quand il construisait l’équipe Eddie Hyde. On se connaissait déjà un peu via Beeby, mais j’ai été honoré de cet appel, et j’ai rapidement fait partie de l’aventure Eddie Hyde. J’en fais toujours partie d’ailleurs, j’ai été là de la création du collectif au premier album, en passant par les mixtapes, et cætera.
A : Maintenant que Take A Mic est bien installé en solo, que tu commences à faire ta place également, est-ce possible d’imaginer un retour d’Eddie Hyde, ou ce serait trop compliqué à organiser comme le retour de la Sexion d’Assaut ?
H : L’avenir nous le dira, chacun se concentre sur sa carrière solo, mais c’est pas exclu qu’un jour il y ait deux ou trois surprises.
A : Avec cette expérience, était-ce facile de se remettre dans la peau d’un rookie pour les besoins de Netflix ?
H : Si tu veux, j’ai vraiment été un rookie longtemps, seuls les gens qui s’intéressent vraiment au rap underground connaissent un peu mon parcours. Et encore c’est pas tout le monde, ça reste un nombre limité, donc ça force à avoir cette humilité de toujours se considérer comme un rookie. Quand je vais faire cette émission, je suis juste moi, personne ne me connaît.
A : Sur Gate 67, il y a Leys, qui a participé avec toi à la saison 1, et Yuz Boy, gagnant de la saison 2. Tu es également proche de Nayra, que l’on a pu voir (trop brièvement) dans cette même saison 2. Est-ce que participer à un tel projet permet de créer ou de renforcer des liens entre artistes ?
H : Bien sûr, quand tu vis une aventure filmée, tous ensemble, ça forge forcément des liens.
A : Combien de temps dure le tournage ?
H : Les premières épreuves sont très condensées. Pour nous, sur la première saison, ça a pris une semaine, jusqu’à l’épreuve des clips. Ensuite t’as une semaine de battement, on revient montrer les clips, puis encore une semaine de battement, puis la demi-finale, encore une autre semaine de battement, et la finale. Je dirais que ça a duré globalement un mois et une semaine. Cette année, ça a un peu changé, on va dire que le tournage dure entre un et deux mois.
A : Et donc, côtoyer autant d’artistes pendant aussi longtemps permet de se rapprocher d’eux.
H : Bien sûr, c’est des rencontres humaines tout d’abord, que ce soit avec les candidats, avec le jury, avec le staff de l’émission, la production… Je suis quelqu’un de très humain, donc je parle toujours avec toutes les personnes que j’ai pu rencontrer là-bas. Je te dis pas que je suis en contact avec tout le monde H24, mais bien entendu que des liens se sont créés, et ça fait toujours plaisir de parler entre humains. Ça facilite aussi la création d’œuvres, quand le feeling humain et artistique passe bien entre candidats.
A : Dans la saison 2, on a vu Fresh aider Shay aux auditions. Si on te le proposait, te verrais-tu devenir juré ou coach dans cette émission à l’avenir ?
H : Je ne pense pas être assez ferme pour être juré, je pense par contre être un très bon coach. En ayant vécu cette aventure, je pense avoir les bons conseils pour ne pas reproduire les erreurs que j’ai pu faire.
A : Tu es le cousin de Deen Burbigo, et tu as grandi à La Courneuve, dans le quartier de Dinos. Est-ce qu’avoir de tels rappeurs, aussi talentueux, dans son entourage apporte une forme de pression pour se mettre à leur niveau ?
H : Ouais, bien sûr. En fait, je ne les regarde même pas comme des rivaux ou des adversaires, c’est des senseï. Ceux qui sont plus âgés sont des senseï, et ceux qui sont plus jeunes aussi sont des exemples. Tiakola vient aussi de là, aujourd’hui c’est le roi de la France. Comme quoi, l’âge ne fait pas tout, et je vois toujours le parcours des miens comme un exemple, une fierté. Quand un des miens réussit, c’est comme si moi, j’avais réussi. Y’a de la place pour tout le monde, même si le rap est un milieu où on se bat pour être le meilleur, on est quand même fiers quand un frère ou une sœur à nous réussit.
A : Ça me rappelle le moment où tu es arrivé à la fin du concert de Nayra pour la féliciter et provoquer une ovation de la foule. Tu étais à deux doigts de la porter comme dans Le Roi Lion (rires).
H : J’étais très fier de voir ma sœur briller, et elle aura beaucoup de choses à dire par la suite. Comme Ash to the eye, La Valentina, Leys, elle va conquérir le public, parce qu’aujourd’hui, en vrai, on s’en fout que tu sois un homme ou une femme, tant que tu rappes, tu nous fais plaisir.
A : Ton nom est une référence directe au « Who’s bad » de Michael Jackson, et ton EP commence par le titre Michael et Janet. Quel impact Michael Jackson a-t-il eu dans ta culture musicale ?
H : Il a eu un impact énorme, parce que pour moi, c’est, et ça restera le meilleur artiste de tous les temps, il n’a aucun égal. Après, il y a beaucoup d’autres légendes, comme Bob Marley, les Beatles, Queen… Et dans notre domaine à nous, le rap, Biggie, 2Pac, et en France, que ce soit Booba, Rohff, La Fouine, des mecs comme Mac Tyer, des mecs comme Niro, et même avant, les IAM, NTM… Chaque beau parcours et chaque belle carrière inspire. Après, moi, en l’occurrence, j’ai choisi de citer le GOAT des GOATs.
A : Sur cet EP, il y a des sonorités très variées, avec certains titres qui tirent même vers le reggae. Pour le public qui t’a découvert sur Netflix, est-ce un risque de te présenter avec une proposition relativement éloignée de ce que tu as pu montrer dans Nouvelle École ?
H : Il faut savoir que si j’avais été jusqu’en finale, c’est ce que j’aurais fait, mais malheureusement, la France ne m’a pas laissé cette chance (rires).
A : C’est plutôt la Belgique qui ne t’a pas laissé la chance en l’occurrence (rires).
H : C’est pareil, ça reste des cousins français.
A : C’est comme des français, mais ils ne sont pas champions du monde.
H : C’est ça, on est champions du monde, ils gagnent Nouvelle École, on ne peut pas tout avoir dans la vie (rires). Comme je te disais, c’est des choses que j’ai déjà faites, comme j’ai fait de la baile funk, de la house, j’ai exploré d’autres sonorités, mais rappé sur d’autres sonorités surtout, ça a toujours été mon truc. Aujourd’hui, je présente ça, plus tard il y aura d’autres prises de risque, et tant que les gens captent la vibe, ça me fait du bien, ça me fait kiffer.
A : Sur Gate 67, il y a également des featurings avec Tuerie et Prince Waly, deux rappeurs qui ont un énorme succès d’estime dans le milieu mais qui ne touchent pas tant que ça le grand public. Te vois-tu suivre une trajectoire similaire ou tenter des morceaux plus mainstream à l’avenir ?
H : Du fait de ma proposition variée, j’aimerais être au moins comme eux, je les vois en exemples, c’est des grands frères. Si je suis amené à avoir le même succès d’estime qu’eux, ce serait déjà une immense réussite pour moi. Ma proposition musicale me ressemble à moi, et tant que je reste moi-même et que, comme je te disais, les gens captent la vibe, ça me va, je prends ce que Dieu me donne.
A : Le morceau Baller avec Prince Waly fait plusieurs références au monde du basket. Y’a-t-il selon toi un parallèle entre la compétition sportive et celle qui existe dans le monde du rap ?
H : Bien sûr, je pense qu’on veut tous être parmi les grands. C’est une mentale que les sportifs ont en commun avec nous. Chaque sportif, dans son domaine, veut marquer l’histoire et faire partie des grands. Dans le rap, on veut tous que notre nom ressorte, qu’il ait sa place dans l’Histoire du rap.
A : Un autre morceau fait référence au sport, Main Event, en duo avec Leys. Le « main event » est utilisé pour des rencontres importantes en sports de combat. Est-ce que c’est l’équivalent de la scène pour les artistes ?
H : Je pense, oui, parce que c’est la rencontre avec ton public. C’est la confrontation entre ce que tu proposes vraiment et les gens qui veulent te voir en vrai. C’est bien en studio, mais on veut ressentir quelle vibe tu dégages en vrai, et quelle sensation on ressent quand on te regarde, quelle émotion tu vas véhiculer. Je pense que tu as fait un très beau parallèle.
A : Tu es souvent présent pour accompagner tes confrères rappeurs sur scène, en auras-tu également en ton propre nom ?
H : Ça devrait arriver dans les mois à venir, on est en train d’organiser une date parisienne, et je donnerai toutes les infos sur mes réseaux en temps voulu.
A : Gate 67 annonce-t-il un format type album ensuite ?
H : Je pense qu’il y aura au minimum encore un ou deux EP avant l’album, et qu’il y aura un album à un moment donné, si Dieu le veut. Pour l’instant, on avance étape par étape, comme dans Nouvelle École.
A : Scred Magazine suivra en tout cas avec attention chaque étape.
Interview réalisée par Adrien
L’EP Gate 67 d’HoussBad est disponible sur toutes les plateformes de streaming.